jeudi 18 avril 2013

AnaCo 5/9 - Les Maï-Maï sont entrés dans la ville



Didier de Lannoy

Congo bololo

2013
  
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Les Maï-Maï sont entrés dans la ville
 
Des "sécessionnistes katangais" !
Et alors ?Ce n'est pas une raison pour fermer sa gueule sur un massacre !

29 mars 2013

Ce n'étaient pas des gens d'ici.
Ce n'étaient pas des citadins, c'étaient des gens d'ailleurs, « de l'intérieur » comme on dit. Ils venaient de la grande périphérie, de la zone annexe ou de la ferme Beijing ou de la campagne profonde, on ne savait pas exactement. Ils voulaient 

 - « Nous sommes fatigués d'être des esclaves ! Nous ne voulons plus de cette souffrance ! » auraient-ils déclaré aux agents de la Monusco
se rendre et se faire entendre. Plus de deux cent cinquante personnes. Un bandeau, aux couleurs de l'ancien drapeau du Katanga, ceint autour de la tête. Des hommes et des femmes. Et, parmi eux, beaucoup de mineurs. Ils ont marché, marché, marché, pendant des kilomètres. En chantant. Certains d'entre eux étaient armés (des fusils de chasse, des arcs et des flèches, des machettes, des fétiches et quelques armes de guerre). Ils sortaient de nulle part. Personne ne les avait vu venir. Ils sont entrés dans la ville par les faubourgs. Ils ont marché, marché, marché. En chantant. Ils ont parcouru près de quinze kilomètres et traversé quatre communes. Pacifiquement. Des policiers ont abandonné leurs armes, enfilé des tenues civiles et pris la fuite. Personne n'a stoppé leur avance. Ils ont fini par arriver au centre-ville en fin de matinée et ont gagné la place de la Poste. Ils ont déchiré le drapeau de la RDC et hissé le drapeau du de l'ancien Etat sécessionniste du  Katanga. En chantant. Les commerçants ont pris peur et ont rapidement fermé leurs boutiques. La panique a gagné tous les quartiers. Des centaines de milliers de citadins, frappés de stupeur, se sont mis à pisser et à chier dans leur froc en regardant un cortège de quelques dizaines de paysans défiler et traverser leur ville en chantant. Ils ont marché sans que rien ne les arrête. Pacifiquement. C'étaient des paysans, ils voulaient se faire entendre. Ils ont continué de marcher jusqu'à ce que des éléments de la Garde républicaine aient reçu l’ordre

 - Ces gens-là étaient dans l'illégalité ! Ils n'avaient pas le droit de manifester ! Ils n'avaient même pas introduit de demande d'autorisation officielle préalable ! Et s'ils avaient voulu se rendre, ils auraient dû déposer leurs armes à l'entrée de la ville ! La RDC est une Etat de droit quand même !
 de leur tirer dessus à balles réelles. Ils ont poursuivi leur progression. Ils ont arraché des barrières, forcé des portes et investi des bâtiments publics. Rien ne pouvait les arrêter. Ils ont tenté de rejoindre le siège de l'Assemblée provinciale. Ils voulaient se faire entendre.

Toujours sous le feu des éléments de la Garde républicaine, transportant leurs blessés, les manifestants ont trouvé refuge au camp de la Monusco.
Ils y ont été désarmés et soignés.
Puis livrés aux autorités militaires.
Et aussitôt transférés
 

- Moins les nombreux enfants ? Moins la cinquantaine de blessés (dont quinze seraient dans un état grave) ? Moins les dizaines de morts (2 corps qui auraient été retrouvés à l'entrée du Tunnel, 1 corps dans le Tunnel même, 1 corps au niveau de l'arrêt de bus Savonnier, 7 corps sur le tronçon compris entre le bar La Pelouse et l'église Garengaze, 7 autres entre la station d'essence Kasenga et le Bureau 2 en face du bar La Pelouse, 3 corps au niveau de Centre-ville non loin de la borne fontaine, 3 autres sur le tronçon entre l'école Bisounours et le bâtiment abritant les bureaux du cadastre sur l'avenue Mama Yemo*, etc)  
dans la capitale, à bord de deux avions militaires, pour y être « mis au secret » et « interrogés » par ses services de« renseignements » ou de « détection des activités anti-patriotiques ».
Ils seront ensuite, après « aveux sur procès-verbal », traduits devant les tribunaux militaires et « justice sera faite »

Cela s'est passé le samedi 23 mars 2013, dans la matinée, à Lubumbashi, en République démocratique du Congo.

On se pose (en haut lieu) les questions suivantes, notamment : Où, depuis quand et comment autant de jeunes ont-ils pu ainsi se retrouver ensemble ? Qui les a rassemblés ? Qui les a guidés ? Le général Numbi avec qui le chef du groupe « Kata Katanga », Ferdinand Kazadi Ntanda Imena Mutombo (déjà arrêté en 2004, transféré à Kinshasa et relâché sans procès), aurait des contacts réguliers ? Le gouverneur de la banque centrale, Masangu Mulongo, qui leur aurait fourni « des nouvelles coupures de billets de banque de 10.000 et 20.000 francs congolais à titre d'encouragement »* ? Ont-ils été drogués ? Pourquoi les services de sécurité se sont-ils montrés si défaillants?
On ne se pose pas (en haut lieu) les questions suivantes, notamment : Quelles sont les problèmes économiques et sociaux auxquels la plupart des gens se trouvent confrontés, permettant toutes les manipulations xénophobes ou séparatistes, et dans lesquelles de semblables mouvements de mécontentement populaire trouvent leurs racines profondes : celui de Bakata Katanga à Lubumbashi tout comme celui des Enyele en Equateur ou celui des adeptes de « Bundu dia Kongo » au Bas-Congo ? A partir de quel degré de pauvreté, de raz-le-bol, de désespoir ou de frustration, des jeunes gens et des jeunes filles normalement constitués sont-ils prêts à se laisser « instrumentaliser », à prendre des risques inconsidérés et à se lancer dans des actions, à première vue, suicidaires ?


* D'après un « Rapport des ONG de la Société civile du Katanga » rendu public le 27 mars 2013 à Lubumbashi, tel que reproduit dans Le Potentiel du 28 mars 2013 sous le titre « La Société civile lève un coin du voile ». A noter une réaction des « Amis de Masangu » dans Le Potentiel du 29 mars 2013 (signée  Masamba Yesse), contestant ledit Rapport, qualifié de « hâtif », « non vérifié » et « réalisé on ne sait dans quelles conditions », confirmant de façon sous-entendue, l'implication du général Numbi, affirmant que « l'idéologie Kata Katanga a un auteur intellectuel, c'est Kyungu wa Kumwanza » et précisant que les manifestants avaient, au départ, l'intention de « présenter le cadavre d'un creuseur au gouverneur du Katanga »